Facturation électronique : un virage obligatoire pour les entreprises dès 2024
La dématérialisation des factures n’est plus un luxe ou une option stratégique : elle devient une obligation réglementaire pour les entreprises françaises. À partir de 2024, un nouveau cadre légal impose progressivement la facturation électronique entre entreprises. Fini les documents papier ou les PDF classiques envoyés par e-mail : place à la e-facture structurée, sécurisée et conforme.
Mais concrètement, que change cette réforme ? Qui est concerné ? Et surtout, comment s’y préparer sans y laisser son ERP ou son comptable ? On rentre dans le détail, sans tourner autour du pot.
Pourquoi cette obligation ? Un objectif fiscal et technologique
Avant d’entrer dans le comment, intéressons-nous au pourquoi.
Le passage à la facturation électronique est une réponse claire à deux grands enjeux :
- Limiter la fraude à la TVA : La DGFiP perd chaque année plusieurs milliards d’euros à cause de fausses déclarations ou de coordonnées erronées. En imposant des factures normalisées et transmises via des plateformes, l’administration obtient une visibilité en temps quasi réel des transactions.
- Accélérer la transition numérique des entreprises : Cela permet d’automatiser des processus comptables, réduire les délais de traitement des factures, et améliorer le suivi des paiements. Un avantage surtout non négligeable pour les PME.
Avec ces deux objectifs en ligne de mire, la réforme s’appuie sur un calendrier progressif et des obligations précises, que voici.
Qui est concerné par la facturation électronique en 2024 ?
À terme, toutes les entreprises établies en France – quel que soit leur statut (micro-entreprise, PME, ETI, ou grand compte) – devront émettre et recevoir leurs factures de manière électronique, dans le cadre des transactions interentreprises (B2B) assujetties à la TVA.
Mais comme toute réforme ambitieuse, l’État a opté pour une mise en place progressive, afin de ne pas mettre le système sous pression d’un seul coup :
- 1er juillet 2024 : obligation de réception des factures électroniques pour toutes les entreprises, et obligation d’émission pour les grandes entreprises.
- 1er janvier 2025 : obligation d’émission étendue aux entreprises de taille intermédiaire (ETI).
- 1er janvier 2026 : obligation d’émission pour toutes les entreprises restantes, y compris les TPE et PME.
Autrement dit, même si vous êtes une petite structure, vous devez pouvoir recevoir des factures électroniques dès mi-2024. Donc autant anticiper tôt, car la transition ne se fait pas en un clic sur un bouton vert.
Qu’est-ce qu’une facture électronique, réellement ?
Attention à une confusion fréquente : une facture PDF envoyée par mail n’est pas une facture électronique conforme. On parle ici de facture au format structuré, c’est-à-dire un document lisible non seulement par un humain, mais aussi et surtout par un logiciel.
Trois formats sont acceptés dans le cadre légal :
- UBL (Universal Business Language)
- CII (Cross Industry Invoice)
- Factur-X : un format hybride combinant PDF + données XML embedded
Le format le plus accessible actuellement reste le Factur-X, car il sert aussi bien à l’œil humain qu’à la machine, ce qui facilite la phase de transition pour de nombreuses entreprises encore peu outillées.
Quelles sont les obligations légales exactes ?
À partir de 2024, les entreprises ont deux grandes obligations supplémentaires :
- Émettre et recevoir des factures électroniques dans un format structuré, via une plateforme agréée.
- Transmettre certaines données de transaction (e-reporting) à l’administration fiscale dans un cadre réglementaire défini.
Pour mettre en œuvre tout cela, les entreprises auront deux options :
- Passer par le portail public de facturation (PPF) : basé sur Chorus Pro, ce portail officiel est gratuit et géré par l’État.
- Faire appel à une plateforme de dématérialisation partenaire (PDP) : des acteurs privés certifiés par l’administration. Ces plateformes peuvent offrir des services plus avancés (intégration ERP, archivage, etc.).
Dans tous les cas, il ne suffira plus d’envoyer un PDF par mail pour être en conformité. L’entreprise devra transmettre sa facture sous format structuré, la faire valider par une plateforme, puis accepter qu’elle transite vers le client ou l’administration via des protocoles normalisés.
Quels outils pour se mettre en conformité ?
Heureusement, on n’est pas tout seul dans cette aventure réglementaire. De nombreux logiciels de facturation ou ERP proposent déjà une gestion conforme aux exigences de 2024 (ou sont en train de finaliser leur compatibilité).
Voici quelques actions concrètes à engager dès maintenant :
- Vérifiez la compatibilité de votre outil actuel (Sage, EBP, QuickBooks, etc.) avec les formats de facture électronique (Factur-X, UBL, etc.).
- Identifiez une plateforme conforme (publique ou PDP) et anticipez l’intégration technique. Certaines entreprises font le choix de la PDP pour automatiser l’ensemble du cycle comptable.
- Formez vos équipes, notamment comptables et ADV, aux nouvelles pratiques : saisie automatisée, contrôle de validité, traitement des anomalies, etc.
Si vous gérez les devis et factures à la main dans un tableur Excel… il va clairement falloir revoir vos process. Il existe des solutions cloud abordables, comme Axonaut, Sellsy ou Henrri, qui embarquent cette conformité et simplifient la transition.
Quels sont les risques en cas de non-conformité ?
Comme toute norme fiscale, la non-conformité expose à des sanctions.
En cas de non-transmission des factures électroniques ou d’erreurs dans le e-reporting, l’administration peut appliquer des pénalités financières. De plus, vous risquez de ralentir les paiements de vos clients s’ils attendent une facture électronique conforme pour valider votre bon de commande.
Et ce qui devait être un gain de temps peut très vite devenir une source de litiges ou de contentieux administratifs…
Quels avantages tirer de la facturation électronique ?
Heureusement, ce n’est pas que des contraintes. Bien utilisée, la facturation électronique apporte des gains concrets :
- Réduction du délai de traitement des factures (gain de temps côté compta, réduction du délai de paiement moyen)
- Moins d’erreurs de saisie grâce à une meilleure standardisation
- Amélioration de la trésorerie avec un meilleur suivi des encaissements
- Suppression des coûts liés au papier : impression, archivage physique, affranchissement… tout cela appartient au XXe siècle
En clair, si vous jouez bien vos cartes, cette réforme peut même devenir un levier d’optimisation opérationnelle pour votre entreprise.
Transition 2024 : checklist pour les entreprises
Si vous ne devez retenir qu’une chose, c’est que l’anticipation est la clé. Voici une liste d’actions concrètes à lancer dès aujourd’hui :
- Faire l’inventaire des outils de facturation utilisés en interne
- Valider que vos logiciels pourront émettre/recevoir des factures électroniques aux formats requis
- Choisir une plateforme de transmission (PPF ou PDP)
- Mettre à jour vos mentions légales de facture (notamment l’identifiant SIREN/SIRET)
- Former les collaborateurs impactés par ces changements
Anticiper, c’est éviter de se retrouver en juillet avec des litiges, des refus de paiement ou un redressement fiscal à la clé.
Et maintenant, on fait quoi ?
Si vous dirigez une PME, n’attendez pas janvier 2026 pour vous y mettre. Les outils existent, la réglementation est claire et les pénalités en cas de retard ne feront pas de cadeau.
Et si vous êtes prestataire ou consultant B2B, pensez aussi à prévenir vos clients : vous serez dans l’obligation de leur transmettre vos factures sous un format structuré. Oubliez les PDF plans envoyés à la volée. Le bon vieux modèle Word a fait son temps.
Dernier mot ? Le passage à la facture électronique est un chantier, certes. Mais aussi une porte vers plus de visibilité, de productivité et de rigueur comptable. Et franchement, dans une époque où les marges se jouent souvent à quelques jours de trésorerie, ça vaut le coup de s’y mettre sérieusement.
